Une blonde dans un bar

Publié le par Violette

transgenre

 

Une fille dans un bar
Mademoiselle Plume se cultive devant un café crème...

 

Deux heures, ou trois, passées dans un bar, une bière, ou deux, et quelques cafés; ma banana split, pour remplir mon petit ventre dodu de travestie mince, de transgenre affamée, de fille à la chevelure en bataille, blonde et plongeant sur d'admirables yeux bleus, des paupières roses, violettes, un sombre brun aux coins et un épais trait noir en travers afin d'établir la gravité d'une féminité qui essaie de faire peser son mystère; un blouson vintage dont le similicuir part en biberine, un pull cintré, rouge comme le vernis de mes ongles, des Aigle aux pieds, jean et patte d'éléphant, recoupé aux ciseaux, sans ourlets, histoire d'affiner le tissu et mettre en valeur une cheville blanche et fragile; un collier, des bagues, des bracelets, à moi toute seule je suis une bijouterie ambulante.

 

Les danseurs de tango voulaient m'appeler Miss Ocytocine; les messieurs et milongueros me surnomment Miss Folliculine. Mince comme un fil de fer, je jalouse les filles: quand ces dernières cherchent comment perdre des kilos, moi je rêve de graisse un peu partout sous ma peau, pour arrondir mes poignets et mes épaules, galber mes cuisses et mes chevilles. Ce matin, avant d'aller sous la douche, j'ai observé ma silhouette dans la glace: je cultive ma ligne malgré moi, à cause d'une fausse-amie. Putain de clope, si je puis me permettre.

 

Je suis entrée dans ce bar en espérant que les clients voient une fille. Maintenant, j'ai l'air d'une gourde: objet clinique en observation, assise, un ouvrage épais en main. "Plume Pinceau et Bistouri", que vous ayez une idée de mes lectures, ce n'est pas que je veuille faire la fille intello, encore moins la bcbg qui se cultive, mais Voici ou Marie-Claire, Paris-Match  ou les particules élémentaires, sont des littératures inaccessibles pour mon trop peu de neurones de blonde qui tentent désespérément de se connecter au fil conducteur de la narratrice, tandis que de toute part, mes oreilles sont assaillies, les gens parlent à leurs tables tout autour, le bruit des tasses, des verres sur le comptoir, la porte qui s'ouvre, et claque, la chaise qu'on tire, qui grince, les vieilles et belles chansons dans le haut-parleur, et au milieu du riche vocabulaire et des phrases délicieusement construites de Fleur Habitson, l'auteure du roman posé précieusement sous ma main câline, je devine les regards posant parfois des questions, que je feins d'ignorer, avec cet effort d'entrer d'une manière nonchalante dans la matière singulière de ma nouvelle vie.

Deux heures et trente-huit minutes après avoir pris place dans ce lieu charmant où fausse gourgandine fait sa gourmande, dîne en s'enfilant deux boules de glaces enfouies sous une montagne de crème chantilly, parce qu'en cette saison, ils ne servent pas ma banana split, occupant mon temps psychologique entre un demi et un café serré, je tourne les yeux une fois de plus contre la baie vitrée: au coin d'une toiture, d'épais nuages gris bleuté aux contours nacrés par un couchant frileux, clairsemés du fond d'un azur qui me fait la promesse du plus beau printemps que mon bas-ventre de pucelle ou de puceau n'oserait espérer, cheminent vers le sud, avec cette allure souveraine dont le ciel hivernal de la Drôme provençale se targue; en face, une autre vitrine: L'Escarpin.

Des chaussures par milliers, exposées comme si c'était fait exprès, et toutes me regardent, je sais qu'elles me narguent. Mais je ne bougerai pas de ma place, quitte à commander une seconde bière bien fraîche, et me cristalliser parmi le décor; hors jeu et hors budget, mais pas endettée, j'hiberne en m'entourant d'une épaisse couche de patience.

L'espoir réchauffe, il est la seule graisse dont je peux garnir mes hanches, mes fesses et le pourtour de mes cuisses, espoir insaturé en ce mois de février, une réserve d'espérances qui sera mes sucres, mon carburant, sous le soleil à venir, à la fonte des neiges, à la forge d'un beau diable de mâle que réclament les plis soyeux de ma chair qui s'ennuie sous les dentelles, les soies et les velours que je ne cesse de lui présenter pour la distraire.

 

Entre Noël et le réveillon du nouvel an de 2015, Lady Plume est née. En 2016, sans m'en rendre compte, j'ai eu la prétention de passer de l'aspect maigrichon d'un homme de petite taille, aux apparences d'une vraie femme. Imaginez la distorsion entre la réalité et comment je me voyais... Il m'a fallu toute l'année 2017 pour enfin m'accepter avec une silhouette et un style d'homosexuel efféminé: j'ai décidé de m'appeler Violette. Je suis un travesti, et ça me va beaucoup mieux.

 

Encore un peu de patience: courant de l'année 2018, mon cou et mon visage seront devenus imberbes. Ce sera définitif. Irréversible. Quel soulagement! Fini la barbe, terminé la moustache. J'attends le printemps pour me remettre en robe. Porter à nouveau des jupes. Une fille entrera dans un bar. Vous me reconnaîtrez peut-être?

Et pour aujourd'hui, que buvons-nous? Un tango panaché ou un café... Dominguez?

Cafe Dominguez, Hyperion Ensemble, Tango Epoca de Oro

Une blonde dans un bar
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F
Beau témoignage , Bonne chance pour l'année qui vient j'aime beaucoup ton style
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